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mercredi 4 octobre 2017

Les p'tits nouveaux


Je suis assis dans un café du centre-ville particulièrement bondé ce soir, rentrée étudiante oblige, parmi lesquels une nouvelle cohorte de «p’tits nouveaux» qui découvrent ce café, cet endroit de prédilection propice aux échanges entre amis et ou collègues-étudiants, propice aussi pour aider à passer au travers les nombreuses heures d’études qui les attendent lors de la nouvelle année scolaire.

Je réussis à me trouver un tabouret libre au comptoir tout près de la fenêtre, avec vue imprenable sur le stationnement. Tabouret libre entre un garçon à ma gauche, et une fille à ma droite, que je présume être en début de cycle universitaire. Comptoir derrière lequel nous sommes cordés comme des sardines, où l’espace qui nous est alloué est à peine plus large que nos épaules, ce qui semble tout de même les satisfaire, tant qu’ils ont assez de place pour y déposer leur portable, leur laptop car, on ne se le cachera pas, les étudiants d’aujourd’hui ne trimballent pratiquement plus de lourds bouquins dans leur sac d’école comme à mon époque. Autre temps, autre mœurs, que je me dis.

Étant depuis peu au «goût du jour» côté technologique du moins, je sors mon iPad muni d’un clavier, ma «bébelle» comme aime si bien le souligner ma blonde, pour ensuite y ouvrir l’application me servant de logiciel d’écriture. Je clique sur la page d’un texte déjà entamé, question d'en peaufiner le contenu et, qui sait, peut-être même le terminer ce soir.

Alors que je suis dans un passage plutôt intéressant, une idée poppe dans mon esprit, amenant mon histoire complètement ailleurs. Je tente d’en préserver l’essence, tout en cherchant les bons mots qui me permettrons d’en tirer une image, une émotion lui rendant justice. J’éprouve par contre beaucoup de difficulté à me concentrer depuis quelques secondes, du moins jusqu’à ce que je crois être en mesure d’en identifier la source, soit l’individu assis à ma gauche, qui n’arrête pas de «branler de la patte». Probablement sa première fois dans un café bondé donc, un peu nerveux, le pauvre.

Vous me direz que ça ne m’en prend pas beaucoup pour être distrait, dérangé. Et moi, je vous répondrai que lorsque les vibrations que son mouvement émet font osciller ma outil de travail sur le comptoir, tout comme le tabouret de bois sur lequel je suis assis, et bien c’est suffisant pour me distraire, me déranger. Je me tourne et m’adresse poliment à l’individu en question, lui demandant de cesser de «branler de la patte» car son mouvement fait osciller mon iPad sur le comptoir. Il me regarde de façon bizarre, ne semblant pas trop savoir de quoi je parle au juste, ou encore fait-il tout bonnement l’innocent, question de se payer ma tête. Les jeunes, de nos jours ...

À peine une trentaine de secondes se sont écoulées lorsque les vibrations reprennent de plus belle. Je me tourne à nouveau en sa direction et reformule ma demande, mais cette fois d’un ton plus ferme, accompagné d’un faciès qui ne laisse rien présager de bon. Même regard bizarre de sa part, ou innocent. Difficile à dire. Au bout d’un certain temps, quelques minutes je crois, les vibrations recommencent. N’étant pas un individu de nature agressive, je n’apprécie pas me faire niaiser, endroit public ou pas. J’en conclus que ses parents ont visiblement omis de lui enseigner les bonnes manières, ou peut-être était-il absent lorsque le respect est passé à son école bref, il mérite une leçon en accéléré de savoir-vivre.

Je me lève de mon tabouret et prends bien soin d’occuper son champ de vision, de capter son attention. Du haut de mes six pieds trois pouces, et des deux-cents trente livres que j’affiche au compteur du pèse-personne, je lui mentionne que s’il poursuit son petit manège, je l’empoigne par le chignon du coup et le sort du café, et ce sans que ses pieds n’aient l’opportunité de fouler le sol, ne garantissant aucunement le type d’atterrissage auquel il aura droit une fois à l’extérieur. Visiblement intimidé, il s’excuse en mentionnant du même souffle qu’il n’a toujours aucune idée où je veux en venir, que ce n’est pas lui qui «branle de la patte». Je termine en lui indiquant qu’un gars averti en vaut deux, pour ensuite me rassoir sur mon tabouret.

Mon intervention a eue pour effet de provoquer une certaine accalmie, du moins jusqu’à ce que je perçoive à nouveau un début d’oscillation de ma «bébelle» et de mon tabouret. Je me tourne brusquement à ma gauche, prêt à mettre ma menace à exécution, pour me rendre compte que le «p’tit nouveau» a pris congé des lieux en douce, et ce sans que je m’en aperçoive, probablement allé étudier dans un endroit plus paisible, moins menaçant.

Confus, je me tourne alors à ma droite, pour entendre ma voisine se confondre en excuses, m'avouant que son «branlage de patte» est bien involontaire, que c’est un geste «nerveux».

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